Torchis et pierres

Bonjour !

Je suis en train de refaire ma toiture, et sa légère surélévation nécessite des rempannages (je sais pas si c’est un terme local, donc je précise qu’il s’agit du remaçonnage du haut des murs) assez volumineux.

Au début, on a essayé de prolonger ces murs en pierre avec…des pierres et un mortier de chaux, mais vu le temps que ça prenait on a décidé de faire plutôt du torchis.
Mais pour utiliser toutes les pierres qu’on avait là et aller plus vite, on s’est finalement dit qu’on pourrait mélanger pierres et torchis, en étant moins minutieux sur l’assemblage des pierres que dans un vrai mur en pierres, et avec beaucoup plus de torchis qu’il n’y aurait eu de mortier.
Je précise que comme c’est un rempannage, ces portions de mur ne porteront rien d’autre qu’elles mêmes, et elles mesures environ 25cm de haut.

On a décidé ça un peu dans l’urgence mais je voulais vérifier que c’était une idée qui tenait la route ?
Et une deuxième petite question, la personne qui nous a montré comment faire le torchis mettait aussi de la chaux dedans, alors que certains de ces murs sont de refend, donc intérieurs, et ne seront jamais en contact avec l’eau. Est-ce vraiment nécessaire, du moins pour ces murs de refend ?

Merci

@Yana_Ol
Bonjour Iliana,
Plusieurs questions se posent :
Comment sont fixées/scellées les pannes ?
Quel est la fonction de la panne « carré » rapportée à la panne déversée ?

L’adjuvantation du torchis à la chaux ne renvoi pas à la question de la tenue à l’humidité, mais à la résistance mécanique du scellement des pannes sur le pignon.
Il faut dissocier le besoin de garnissage/remplissage de l’arase, du besoin de scellement/fixation des pannes, d’autant qu’elle ne sont pas implantée d’aplomb, mais déversées, ce qui induit des déformations sous contraintes aux appuis différentes dans un cas comme dans l’autre.

Bonsoir Jean-Patrick,

Merci pour votre éclairage.
Je n’avais pas du tout imaginé que le torchis-pierres pouvait porter la panne intermédiaire, puisque celle-ci semblait très bien tenir sans ce rempannage - je n’avais envisagé que le garnissage et pas la fixation. Donc j’espère que ça va aller… Je ne saurais pas vous dire comment les pannes intermédiaires sont fixées, j’ai l’impression qu’elles sont juste posées à un endroit du mur où « ça tient ». Sur la photo, on voit que la panne d’origine (foncée) est posée sur une cale encastrée dans le mur.

Et pour répondre à votre autre question, la seconde panne (claire) est venue consolider l’ancienne. Mes charpentiers m’avaient parler de faire ça plutôt que de la remplacer, et je pensais qu’ils allaient donc la consolider à un endroit précis en la doublant, mais pas sur toute la longueur ! Mais c’est ce qu’ils ont fait et je n’ai pas voulu demander pourquoi. Pensez-vous que ce soit une bonne pratique, ou que c’était juste plus rapide ? Pourtant, ils ont bien remplacé l’une des pannes faîtières, mais pas une autre, donc il semblerait qu’il y ait une logique.

Pour résumer, si je comprends bien il faudrait que je détermine si les pannes tiennent vraiment en reposant sur le mur en pierres où si elles en arriveraient à reposer, à la longue, sur mon torchis, pour savoir si je dois mettre de la chaux ? Dans le second cas, est-ce qu’avec de la chaux c’est solide (mon mélange : 1 de chaux pour 2 de terre, 1 de sable et 1 de paille) ?

Merci beaucoup !

Sur la photo la panne faitière est remplacée mais seulement une panne intermédiaire et pas l’autre ; c’est curieux vu le changement de section entre l’existant et les nouvelle pièces.
Vous confirmez ?

Ils ont conservé l’ancienne panne sans doute pour simplifier la mise en œuvre et conserver l’appui.
L’ancienne panne ne porte plus de charge.

Dépend de la part d’argile dans la terre… Ce mélange peut se dévoiler trop riche en liant, comme trop pauvre selon la quantité d’argile contenue dans la terre.

Bonjour Jean-Patrick.
Je m’étais trompée dans mon message : ils ont doublé les deux pannes faîtières (l’ancienne est cachée derrière la nouvelle sur ma photo), mais sur les deux pannes intermédiaires dont ils se sont déjà occupées, l’une a été doublée tandis que l’autre a été remplacée.
A chaque fois en tout cas, on pouvait marcher dessus sans problème avant d’avoir réalisé le rempannage, donc ça me laisse imaginer qu’il ne porte ni ne portera pas de charge, est-ce que je me trompe ?

Pour le mélange, on en revient à ce que vous me disiez dans une autre question. J’ai fait les tests comme vous m’avez dit, pour l’instant le plus concluant est 4 de terre pour 1 de sable, mais il faudrait peut être diminuer encore un poil la dose de sable. Je me dis que cette terre est peu-être tout simplement déjà équilibrée, parce que les blocs de terre que j’ai récupérés à la pioche en creusant ne s’effritent pas ni ne se fissurent en durcissant. Et ils sont plutôt incassables !

Mais quand on m’avait donné cette recette de torchis j’étais étonnée qu’il y ait si peu de sable, parce que je partais du principe qu’il fallait du sable pour la terre mais aussi pour la chaux (Saint Astier NHL 3,5) ! Est-ce que c’est bien le cas ? Ou avec une dose de 1/4 de sable pour 1 de terre, combien de sable mettriez-vous dans ce torchis à 1 de chaux ? Et je reviens à ma question initiale, si ce torchis ne porte effectivement rien, la chaux est-elle nécessaire ?

Merci !

Sur la photo on voit que les chevrons ne sont pas en appuis sur la panne existante (grise et de section carrée.
Dès lors on ne peut pas considérer que l’ancienne panne porte quoi que se soit.
Qu’appelez vous doublé ? Toujours à cet endroit je vois 2 section différentes.
Pour considérer un doublement de poutre, il faudrait un moisement c’est à dire une liaison mécanique entre les deux (à minima à mi portée ET aux extrémités ou proche des appuis), le plus souvent métallique, entre les 2 poutres…
C’est quand même curieux que pour une même contrainte de chargement, une même portée, un même entraxe, et sous réserve que la structure et la bande de chargement soit symétrique, le choix ai été fait de « doubler » une section et pas l’autre.

Vous ne pouvez pas comparer une contrainte localisée (concentrique) quand vous marchez sur poutre, et une contrainte linéaire (uniformément répartie) dévoilée par le poids de la couverture, le poids des chevrons, la contrainte climatique neige et vent (pour info, 100km/h de vent correspond à peu près à une pression de 50kg/m2).
De plus marcher sur une poutre renvoie une contrainte temporaire alors que la charge de la couverture/chevron est permanente ; intervient alors ce que l’on nomme le fluage, c’est à dire une déformation différée dans le temps sous l’action d’une contrainte et du temps qui passe…
Donc le test empirique de marcher sur une pièce de charpente pour évaluer sa validité ne présage de rien.
Le mystère que certaines sections soit doublées et d’autre non reste entier.

Quand vous parlez de terre il s’agit de terre de déblais, donc d’un mélange naturel de limons, d’argile, et de sable, voir de grave.
Il est possible que votre terre soit déjà de bonne composition (pour un enduit par exemple ou un torchis à vocation de revêtement/garnissage, par opposition à un mortier structurel.
Si vous devez ajouter de la chaux pour augmenter la résistance mécanique, vous devrez rajouter du sable pour éviter que le nouveau mélange ne soit trop riche en liant (argile et chaux).

Difficile de vous répondre pour la simple et bonne raison que :

  • je ne peux pas évaluer, même à la grosse louche, la réaction aux appuis de la charpente et notamment aux appuis des pannes déversée.
  • quand on a dit chaux on n’ apas dit grand chose sur le type de chaux (aérienne CL 70/80/90, hydraulique NHL 2/3.5/5) ; la chaux aeriènne n’a pratiquement aucune résistance mécanique à la compression, ce n’est pas sa vocation ; la résistance des chaux hydrauliques est variable (résistance à 28 jours : NHL 2 = entre 2 et 7 Mpa, NHL 3.5 = entre 3.5 et 10 Mpa, NHL 5 = entre 5 et 15 Mpa.
    Mpa X10 = Kg/cm2
    Pour comparer (juste pour comparer, hein, il n’est pas question de promotionner le ciment en rénovation du bâti ancien, loin de moi cette idée, mais cela permet de comprendre que les techniques d’emploi de l’un et de l’autre ne sont pas d’un même ordre de grandeur) un ciment artificiel Portland CEM II 32.5 = 25/30 Mpa

Il n’est pas question de remettre en cause les choix et le travail de vos charpentier mais de comprendre ce qui a prévalu dans leur prescription et réalisation.
Question garnissage et scellement des pannes, il est question de comprendre comment l’ouvrage « fonctionne », comment l’ouvrage se comporte sous contrainte (permanente et temporaire) pour évaluer ses déformations et le report de ces contraintes et déformations sur le garnissage en torchis.

Tout autre approche est empirique et n’apporte aucune garantie de stabilité/durabilité et ne peut donc répondre à votre question. L’observation à plus ou moins longue échéance et le cas échéant l’apparition de désordres dans le torchis ou dans la charpente sera seul juge de la cohérence des prescriptions.

Merci pour toutes ces informations. J’avoue que maintenant je ne sais plus bien quoi faire… et je ne suis pas certaine que mes charpentiers soient fiables. Ils ont du moins l’habitude de travail de façon très conventionnelle et je doute qu’ils aient une grande expérience du bâti ancien. Donc ils ne peuvent pas me conseiller sur le rempannage par exemple, parce que si ça n’avait tenu qu’à eux il aurait été à base de ciment !
Mais je peux au moins leur demander si ce rempannage portera des charges ou pas, selon eux… et peut-être consulter un maçon que je connais dans le coin. Et je leur demanderai aussi pourquoi ils ont fait ce choix de « doubler » (j’entends par là le fait d’accoler une panne neuve à une vieille panne plutôt que de la remplacer) certaines pannes et pas d’autres.

Pour le dosage en tout cas, est-ce que ça fonctionne avec une logique d’addition ? Par exemple si pour un de chaux il faut 2 de sable, et pour 4 de terre 1 de sable, on peut faire le mélange suivant : 1 de chaux, 4 de terre et 3 de sable ?

Je profite pour tenter ma chance : vous ne connaissez pas un artisan qui pourrait venir voir ça dans le nord de la Sarthe (limite Mayenne, Orne) ? Pour l’instant, je n’ai trouvé personne qui soit aussi bien sensible à l’écologie, à la nécessaire cohésion des matériaux dans le bâti et ancien ET à l’auto-restauration !

Demandez leur simplement pourquoi certaines pannes ont été changées et avec une section significativement plus importante, et d’autres laissées avec la section initiale, et plus faible…
C’est le changement de section pour certaines poutres qui interroge le plus.

Avez vous consulté la carte des pros référencé Twiza ?
Maçons, charpentiers, architecte, maitre d’œuvre ou assistant à maitre d’ouvrage pour partager leur propre réseaux ?
Vous pouvez aussi contacter la délégation locale de l’association Maisons Paysannes de France.
Il répertorient les professionnels engagés dans la rénovation cohérente respectueuse du bâti ancien…
https://maisons-paysannes.org/maisons-paysannes-de-france/delegations/

D’accord, je leur demanderai ça alors.
Et pour les pros oui, personne dans le coin… Le président de Maisons Paysannes de la Sarthe était venu nous faire visiter autrement nos bâtiments, mais ils ne donnent pas de noms d’artisans, d’où ma bouteille à la mer !

Je suis étonné ; c’est bien la première fois que l’on me fait ce retour ! Singularité locale ?