Quelle chaux pour mur projeté épaisseur 35cm de chaux-chanvre

Bonjour,

Nous construisons une maison en poteau-poutre + ossature rapportée avec remplissage en chaux chanvre projeté.
La structure bois sera noyée dans le béton de chanvre.
Nous travaillerons avec un combiné 3CM que nous avons acquis pour l’occasion - il y a environ 80m3 à projeter.

La partie bois est terminée, le toit et là, isolé, et bien au-dessus de nos têtes, nous allons donc travailler à l’abri.
Les contraintes en temps font que nous allons réaliser le chantier de projection en octobre et novembre.

Le premier souhait était de faire du terre-chanvre, finalement écarté car la mise en œuvre intervient trop tard dans la saison à notre sens.

Aujourd’hui l’interrogation principale réside dans le choix de la chaux.
Une chaux Saint Astier préformulée (Batichanvre) ou une chaux NHL 3.5 du commerce (chaux Socli) ?
Quelle différence concrète ce choix aura-t-il sur la qualité de la maison finie ?
Est-ce que la saint-Astier pourra nous garantir une prise et un séchage plus rapide, ce qui peut être avantageux tard dans la saison ?

Une autre chaux vous vient-elle tout de suite à l’esprit ?

Toutes vos réactions et pensées seront les bienvenues.

Bonjour Jan,

Oui les mélanges terre-chanvre demandent de pratiquer des tests, surtout si le liant est une terre de déblais qu’il faut évaluer et éventuellement ajuster…

Les 2 sont possibles.
En construction neuve je n’ai aucune contre indication pour du Batichanvre, tout au contraire, c’est un formulé particulièrement adapté à la construction neuve.
En rénovation du bâti ancien il faut l’exclure et privilégier la NHL2 ou NHL3.5

Le batichanvre est adjuvanté largement au sable pouzzolane.
La prise pouzzolanique propose un complexe plus fermé à la diffusion de vapeur d’eau et c’est pour cette raison qu’il est à écarter en rénovation du bâti ancien pour laisser respirer le mur maçonné d’origine, sujet aux remontées capillaires (ce qui n’est pas le cas en construction neuve)
En construction neuve, cela ne propose aucune différence marquée puisque le béton allégé est ouvert des 2 cotés, en tout cas il n’est pas projeté sur une maçonnerie ancienne sujet aux remontées capillaires. D’autant que la perméabilité à la diffusion de vapeur d’eau sera aussi largement déterminée par les autres composantes du complexe et notamment les revêtements de finition…
La prise pouzzolanique propose aussi une meilleur résistance mécanique ; ainsi, il faut moins de liant à résistance mécanique égale, et si le complexe est moins minérale, il est plus performant thermiquement à épaisseur égale.
Enfin lorsque le béton est banché, le Batichanvre propose un délais de décoffrage plus rapide.
L’avantage de la projection est qu’elle demande bien moins d’eau ; le séchage et la remise en service ou la reprises d’autres ouvrages sensibles à l’humidité, est aussi plus rapide.
La projection permet une mise en œuvre beaucoup plus rapide qu’un banchage et évite les reprise de bétonnage d’un jour sur l’autre, qui font apparaitre le risque de fissuration. A ce sujet, préférez les reprises de bétonnage dans les angles rentrants.
Mais, la projection, exclue le tassage du mélange en bordure d’ossature et propose un retrait de quelques mm…

C’est la projection qui par son besoin plus limité en eau qui réduit le temps de séchage.
Mais le temps de séchage est avant tout autre considération et de loin, la question de la météo (température/hygrométrie) pendant l’application, la prise, et le séchage.
Le choix du liant n’est pas neutre, mais en dernière analyse, ne proposera qu’un impact très limité au temps de séchage, au regard des autres critères.

Lorsqu’il est question de bâti ancien maçonné je prescris :

  • la NHL 3.5 St Astier
  • la NHL 2 Boehm (Michel Boehm) https://chauxboehm.fr/
  • voir la CL90 de Saint Astier mais avec une adjuvantation sable pouzzolane et/ou CNP (ciment naturel prompt - cousin de la chaux et rien de commun avec un ciment Portland…

Lorsqu’il est question de construction neuve, et/ou structure bois je prescrit :

  • Batichanvre Saint Astier
  • Tradeco Saint Astier
  • CNP Vicat (ciment naturel prompt) avec retardateur de départ de prise acide citrique alimentaire ; dans ce cas, je fais venir un technicien Vicat pour un démarrage chantier, car la prise rapide même retardée induit des dispositions et une organisation toute particulière…
  • Mais aussi les recettes originelles en NHL2 NHL3.5 et CL90…

Ci-joint un Batichanvre sur colombage contemporain apparent (1) et un Tradeco sur maçonnerie de blocs ciment (2) ; les 2 sont banchés et non projetés. Mais lorsqu’ils sont laissé brut, on peut apprécier la différence de coloris et l’esthétique que propose les couches façons pisé.
Notez que la provenace du chanvre, et donc ces tanins, infulent aussi sur le coloris, et pas qu’un peu…


Bonjour Jean-Patrick,

Merci pour votre réponse détaillée.
Nous allons nous diriger sur le Batichanvre de St-Astier.
En effet la régularité de cette chaux et sa résistance accrue offerte par la prise pouzzolanique nous semble intéressante.

Nous avons aussi décidé de projeté deux tiers de l’épaisseur du mur à l’automne et le dernier tiers (extérieur) au printemps.
Je m’explique : la structure bois étant centrée dans le mur, nous avions au départ opté pour la mise en places de banches à l’extérieur, écartées de 10 cm de la structure bois, contre lesquelles projeter depuis l’intérieur. (Les banches sont retirées dès le lendemain.)
Au final il nous semble plus simple de fixer les banches « à zéro » contre la structure, de projeter seulement 25cm d’épaisseur, et de projeter par la suite les 10 cm manquants par l’extérieur.

Nous y voyons deux avantages : le gain de temps et de simplicité à bancher, mais surtout aussi l’épaisseur plus limitée. Le chaux chanvre séchera plus vite, et ça nous fera 50 m3 à projeter plutôt que 80 avant l’hiver, nous finirons donc moins tard en fin d’automne, nous laissant peut-être une meilleure fenêtre météo pour démarrer le séchage.
Et si le temps et la météo le permettent, la seconde passe à l’extérieur pourra tout de même être réalisée encore en novembre.

Voilà pour le projet, au plaisir d’échanger dessus.

Je vous déconseille très vivement cette approche. La tenue monolithique du complexe fibré et son comportement mécanique avec une ossature centrée, tiennent à l’enchevêtrement de ses fibres. Si à cœur il y a une rupture, un effet de cisaillement pourrait se dévoiler.
De plus, le béton allégé fait apparaître un retrait significatif : le liant hydraulique d’une part mais aussi et surtout le gonflement de la chenevotte qui se rétracte au séchage. Il y aura donc un vide de quelques mm entre vos couches. Qui plus est sur un support lisse (banche), vous cumulez toutes les dispositions d’instabilité du complexe.

Pour vous en convaincre, il serait préférable de faire valider votre approche par un technicien Saint Astier ou consulter l’association Construire en Chanvre…

D’accord, je vous remercie pour cette mise en garde, je vais essayer de me renseigner auprès de l’association construire en chanvre afin de voir ce qu’ils en pensent.

Le retrait de la chènevotte est-il présent malgrès quelle n’est pas mélangée au liant avant la sortie de buse ?
Absorbe-t-elle assez d’humidité pour gonfler ?
Je pensait qu’avec le procédé de projection du combiné 3CM + cardeuse, la chènevotte étant soufflée sèche jusqu’à la sortie de la buse ou la lait de chaux vient « l’enrober », le retrait était minime, voir inexistant.
Une projection d’un seul tenant serait évidemment préférable, notre sujet d’inquiétude là c’est le séchage.

Avez-vous vous eu connaissance ou retour d’expérience de murs projetés en une fois sur une épaisseur comparable (environ 35cm) ?
Que pensez-vous tout particulièrement du risque de moisissure de la chènevotte au cœur d’une épaisseur semblable avec un début de séchage en milieu/fin d’automne ?
La maison est rehaussée du sol, couverte par le toit, et pourra éventuellement recevoir un poêle d’atelier durant l’hiver. Les menuiseries ne seront installées qu’en fin d’hiver afin de favoriser la ventilation et le mur ouest, le plus exposé aux intempéries, protégé par un échafaudage bâché par l’extérieur.
Le risque de forte gelées n’est que peu à craindre dans notre régions, mais le climat peut être relativement humide.

Merci encore pour vos retours !

Le retrait est moins important en projection qu’en branchage. Mais il n’est pas « inexistant ».

En projection de 350 mm non je n’ai pas de retour, mais je prescris, j’ai accompagné et j’ai autoconstruis avec des épaisseurs entre 450 et 600 mm en climat de montagne 900/1200m alt. C’est vous dire si le mélange n’était sec à cœur qu’au bout d’1 année, et encore…
Je n’ai jamais eu de problème de moisissure.
J’ai un châssis en ossature de test avec des bétons de chanvre différants, mis en œuvre et laissé en extérieur depuis plus de 10 ans, qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente.

Pour moi la question de la moisissure est la question de la qualité de la chenevotte (stockage et séchage) et de la ventilation, plus que de tout autre considération.

Amenagez suffisamment de ventilation sous la bâche car c’est la bâche qui va proposer le risque de moisissure (température/humidité)

Bonsoir Jean-Patrick,

Votre réponse me rassure pas mal. On s’est lancé dans ce projet dont les enjeux ne sont pas négligeables, avec confiance courage, mais certaines connaissances on les acquiert en court de route … Et là il nous en manque clairement.
Les informations sur le chaux chanvre projeté en construction neuve ne sont pas très répandues et c’est bien agréable d’avoir vos retours.

La bâche sera écarté du mur d’au moins 1,5 m (sur la face extérieure de l’échafaudage et aura pour rôle de protéger des projections d’eau de pluie venant de l’ouest. (Le mauvais temps viens d’ouest dans nos contrées.) Elle protégera des intempéries mais n’empêchera pas la circulation d’air donc.

Je joins quelques photos du projet si j’y parviens :



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